La corde sensible…
Envie de vous raconter une histoire humaine, l’histoire de parents qui ne savent pas s’ils font bien ou non… L’histoire de parents qui font au mieux, qui essaient, s’interrogent. Une histoire somme toute assez banale…
Un fils, sensible, attentif, qui ne supporte plus l’école… Une école qui passe son temps à lui dire. A lui dire que ses notes pourraient être plus hautes, « peut mieux faire ! ». Une école qui dit, mais n’écoute pas… Il faut rentrer dans le cadre, il faut viser le bac, il faut passer ce gué pour aller plus loin, sinon, c’est foutu ! Sinon, on sort !
Et puis, cette guitare offerte, ce père qui a tenté de lui apprendre, pensant que son envie de transmettre serait contagieuse. Ses doigts qui subissent la pression et qui lui font dire « ça fait mal ». La pauvre guitare, reléguée, oubliée…
Pas tant que cela, elle attendait son heure.
Soudain, une soif, une envie de professeur, plus simple qu’un père, si attentionné soit-il. Trouver quelqu’un qui va lui confirmer qu’il a raison, que la musique c’est sa vie. Une femme, que le hasard et le bouche à oreille nous amènent. Elle a su lui donner des bases de solfège, tout en étant suffisamment pédagogue pour lui laisser pratiquer.
Voilà, la route est ouverte. C’est sa voie. Plus rien d’autre ne vaut de s’investir, il sait ce qu’il veut. En 4ème, il passe la première, sourire.
Pour nous parents, les questions s’amoncellent. Doit-on le laisser sortir du rang, partir sur un chemin difficile ? Va-t-il s’investir ou renoncer après quelques mois ? Ces moments sont périlleux, angoissants. Mais nous percevons qu’il est mal, qu’il ne peut plus rester au collège.
Je cherche une école de musique, je trouve, une école privée, bien sûr, le Conservatoire et les ENM (écoles nationales de musique) ne sont ouverts que sur préméditation…
Il passe l’audition, la réussit. Bien sûr aussi, c’est payant, mais notre « investissement » s’avère fructueux. Il travaille assidûment toute l’année et décroche facilement son diplôme.
Et puis, c’est à nouveau le vide, il est trop jeune pour enseigner, pas crédible.
Il passe un an à la maison, sans cadre imposé, sans repère, si ce n’est nous qui lui faisons confiance. Il continue à travailler, seul, progresse encore et encore.
Il faut trouver une solution, une issue, un sas de décompression. Une école à Nancy est unanimement reconnue, je lui propose de poser sa candidature. Au début, il refuse, pensant ne pas avoir le niveau. Puis peu à peu, il se prend au jeu, il choisit un morceau compliqué, il le prépare, le travaille, le peaufine, il finit par l’envoyer avec sa demande d’admission. Il est recontacté pour une audition à l’école. Il part en train, en train de se rendre compte qu’une nouvelle aventure s’ouvre à lui.
Il réussit l’audition et part un an dans une ville éloignée du cocon familial, un an de passion partagée, de rencontres, de moments inoubliables. Là encore, il nous confirme que nous avons eu raison de lui faire confiance, il prend sa chance et nous la donne en retour. Il ressort meilleur espoir avec les félicitations du jury, mais surtout il ressort encore plus investi, même si cela ne semblait pas possible, dans cet instrument, la guitare, dans ce monde, la musique.
Au jour d’hui, il transmet son savoir et son amour de ce qu’il sait à d’autres personnes, de tous les âges. Il compose, il joue, il n’est pas encore connu, mais il est reconnu. Il aime ce qu’il fait, je crois pouvoir dire qu’il est heureux. Cette histoire, sans doute un peu longue, j’avais envie de la partager, car je sais que c’est une belle histoire. Une histoire Humaine…