Souvenir qui demande, par sa fulgurance ce soir, à être raconté… J’ai un doute, peut-être l’ai-je déjà fait ici… Si c’est le cas peu importe. Je ne sais pourquoi cette histoire me revient, accompagnée des ressentis de l’époque, j’en souris, c’est l’essentiel.
J’avais alors entre 6 et 9 ans, je le sais. Je suis « rentrée » chez mes parents à 6 ans, nous avons déménagé j’avais 9 ans.
Nous habitions alors dans un appartement plus que sommaire. Aujourd’hui, je pense qu’il serait plus ou moins qualifié d’insalubre, mais nous n’avons plus les mêmes valeurs. Pour ce «jeune» couple», mes parents, c’était le confort. Après avoir résidé plusieurs années dans un meublé, cela faisait du bien d’être dans «ses meubles». D’accord, c’était petit, la porte, qui nous servait aussi de fenêtre, donnait sur un balcon qui desservait l’ensemble des appartements de l’étage.
Qui plus est, nous avions la chance d’être le plus près de l’escalier, donc de voir défiler tous les locataires de l’étage qui rentraient chez eux. Le détail le plus amusant, si l’on peut dire, c’est que par contre les W-C. communs étaient situés dans une tour au milieu de la cour qui était elle-même desservie par une passerelle à laquelle on accédait à l’opposé des escaliers. Moralité : comme je vous l’ai déjà dit, lorsque les gens rentraient chez eux, ils passaient systématiquement devant chez nous ; idem quand ils sortaient de chez eux. Par contre, lorsque nous devions nous rendre aux toilettes, nous passions et repassions automatiquement devant chez eux.
Cet appartement n’était composé que d’une petite cuisine avec une petite alcôve ouverte dessus, d’un couloir qui menait à une autre petite pièce avec une autre petite alcôve qui était «notre chambre». Je dormais en fait dans un canapé pliant adossé au pied du lit de mes parents.
Bref, tout cela pour dire que la vie était un peu contrainte.
Je me retrouvais seule, après des années passées dans une autre famille où j'étais entourée d’autres enfants.
Vous allez enfin comprendre pourquoi j’illustre mon propos par cette photo de voiture rutilante.
A l’étage en dessous, Mario, un petit garçon, était aussi esseulé que moi. Nous nous retrouvions donc à mi étage, dans cette cage d’escalier noircie par le temps.
Il avait eu pour Noël un volant agrémenté d’un clignotant qui faisait du bruit, mais pas de lumière, d’un levier de vitesse et surtout d’une ventouse qui permettait de le fixer sur la marche inférieure à celle où nous nous étions assis.
Nous avons fait tous les deux de merveilleux voyages, j’étais fière qu’il accepte de me conduire, nous ressentions le moelleux du cuir des sièges, nous ouvrions grand nos yeux pour découvrir ces paysages que nous seuls pouvions voir, nous sentions l’air de l’ailleurs juste en l’imaginant…
Je ne sais pas ce qu’il est devenu, Mario, j’espère qu’il a parfois, comme moi, un sourire qui lui effleure les lèvres…